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Mon Bilan Prévention : premiers enseignements et perspectives de recherche

le 6 novembre 2025

Congrès 2025 de la Société Française de Santé Publique
Palais des Congrès de Lille
À l’occasion du congrès 2025 de la Société française de santé publique (SFSP), le Collège universitaire des enseignants de santé publique (CUESP) a coanimé, avec l’École des hautes études en santé publique (EHESP) et le Collège national des généralistes enseignants (CNGE), un symposium consacré à Mon Bilan Prévention intitulé « Mon Bilan Prévention : premiers enseignements et perspectives de recherche ».

Lancé en 2024, Mon Bilan Prévention (MBP) est un dispositif national visant à renforcer la prévention primaire et secondaire dans le parcours de soins. Il permet à chaque assuré, à des âges clés de la vie (18–25 ans, 45–50 ans, 60–65 ans et 70–75 ans), de bénéficier d’un entretien de prévention dédié, entièrement pris en charge par l’Assurance maladie, réalisé par un médecin, un infirmier, un pharmacien ou une sage-femme. Cette consultation vise à faire le point sur les habitudes de vie, l’environnement et les facteurs de risque, et à coconstruire un plan personnalisé de prévention.

Premiers résultats de déploiement

Les premières analyses quantitatives, fondées sur les données du Système national des données de santé (SNDS), montrent une montée en charge progressive du dispositif, avec plus de 168 000 bilans réalisés sur les 18 premiers mois. Les médecins généralistes et les pharmaciens apparaissent comme les principaux effecteurs, et les bénéficiaires concernent l’ensemble des tranches d’âge ciblées, avec une participation plus marquée des femmes. Ces résultats soulignent toutefois des disparités territoriales et sociales, invitant à une vigilance particulière sur les enjeux d’équité d’accès.

Appropriation par les professionnels et les territoires

Plusieurs travaux qualitatifs présentés lors du symposium ont permis d’explorer la manière dont MBP est investi par les professionnels de santé du premier recours. Ils mettent en évidence une appropriation hétérogène, influencée par les trajectoires professionnelles, la formation initiale et continue, ainsi que par les conditions organisationnelles d’exercice.
Dans le cadre de ses travaux de thèse d'exercice, le Dr Thomas Cardot a mis en évidence que MBP est perçu par certains comme un cadre structurant favorisant une posture plus globale et réflexive en prévention, mais il se heurte également à des freins persistants : contraintes de temps, manque de formation à la posture éducative, articulation parfois limitée avec les ressources d’aval.

Les travaux menés par la Dre Alice Derome Le Bret (dans le cadre de son M2) auprès des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) soulignent un niveau d’implication encore variable. Si MBP reste souvent secondaire par rapport aux enjeux d’accès aux soins, il ouvre néanmoins des perspectives intéressantes en matière de coordination, d’orientation des patients et d’expérimentation locale de parcours de prévention.

Gouvernance, évaluation et recherche en prévention

Le symposium a également mis en lumière les enjeux de pilotage et de gouvernance du dispositif, notamment à travers le rôle des agences régionales de santé (ARS), dont l’implication varie selon les contextes institutionnels et les ressources disponibles.

Dans ce cadre, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), par la voix du Pr Philippe Michel, a présenté les fondements du cadre évaluatif de Mon Bilan Prévention, structuré autour d’une évaluation ex ante (acceptabilité et faisabilité), d’un suivi en continu du déploiement et d’une évaluation à plus long terme centrée sur les changements de comportements, les pratiques professionnelles et les inégalités sociales de santé.

Enfin, le symposium a été l’occasion d’inscrire MBP dans une réflexion plus large sur la recherche en prévention, avec la présentation du Programme national de recherche PrevAction par le Pr Franck Chauvin. Ce programme ambitionne de structurer durablement la production de connaissances en prévention, de renforcer les liens entre recherche, politiques publiques et acteurs de terrain, et de développer une culture partagée de l’évaluation des interventions de prévention.

À travers ces échanges, le symposium a confirmé le rôle de Mon Bilan Prévention comme un objet à la fois opérationnel et scientifique, offrant un terrain privilégié pour analyser les transformations en cours du système de santé et pour penser, collectivement, les conditions d’un véritable « virage préventif » en France.